Le blog des aliments fermentés

Mon dernier livre : Pourri

Je sais, son titre est spécial, mais il est volontairement provocateur !  Il vous présente la fermentation, sous un autre angle que l’habituel : un angle un poil anti-conformiste mais toujours gastronomique, si, si. Réhabilitons le pourri.

J’ai été enchantée lorsque Catherine Flohic, des éditions les Ateliers d’Argol, s’est adressée à moi pour écrire un livre sur les aliments fermentés « autrement ». Il s’agissait d’adopter un angle qui ne soit pas celui, rabâché, de la santé, mais de parler vraiment du coeur du problème, le goût. Les aliments fermentés, avant tout, sont bons à manger ! Et ils ont du goût avec tout ce que ça implique de sensualité, de volupté, de culpabilité parfois, d’animalité, et… d’humanité. C’est pour cela que, moi, j’aime ces nourritures : pour tout ce qui les rend « non conformes » à certaines règles, et tout cela au nom du plaisir de manger.

Frôlons la pourriture

Pourri, vous en conviendrez est un mot très péjoratif. C’est même une insulte ! Cependant, des aliments que certains considèrent comme totalement pourris, sont, non seulement comestibles, mais très appréciés et promesse d’incomparables délices. D’autres, tout en restant convenables, flirtent avec la pourriture. Alors où se trouve la frontière entre le fermenté et le pourri, entre le comestible et l’avarié ?

La frontière entre les deux appréciations, périmé ou comestible, pourri ou fermenté, pourri ou suri, rance ou mangeable, délicieux ou répugnant, varie, non pas selon les produits eux-mêmes, ni les individus qui les produisent et les mangent, mais selon les idéologies, les groupes, les communautés, les religions, les classes sociales, les pays, les régions, les continents. Rien n’est plus subjectif  ni plus culturel !

Dans le livre, je vous raconte le haggis, le gravlax (le vrai), les ancêtres des sushis qui étaient fermenté pendant un an, le garum, mais aussi le tempeh plein de moisissures et le natto gluant. Le huitlacoche malade, et le kiviak à moitié décomposé. Et pas besoin d’aller à l’autre bout du monde: nous avons aussi le camembert gris-rouge d’antan, bien de chez nous, et le brie noir qui revient sur le devant de la scène. De même que le pourri bressan et les caudelées normandes. Vous ne savez pas ce que c’est ? Alors lisez mon livre.

Des cultures en perdition

La gastronomie fait souvent fi des normes et de l’hygiénisme, du puritanisme et de la bienséance. Les fromages forts et les poissons faisandés racontent des histoires de résistance contre le colonialisme, d’affirmation d’une culture en perdition ou de fierté d’appartenir à un terroir. Ils racontent la civilisation et l’histoire des hommes qui les mangent. Ils les inscrivent dans une longue lignée qui remonte à la source de l’humanité, et sans doute avant, quand l’animal n’était pas un étranger. Nous avons aussi une grande part d’animalité, et c’est elle que nous célébrons en mangeant ces aliments « pourris ».

Aliments en gestation

Aliments vivants, en gestation, ils sont à la fois du côté de la décomposition, mais surtout de l’affirmation que la décomposition n’est qu’un début. C’est la vie qui renaît infiniment d’elle-même. Ces aliments particuliers nous montrent que la mort n’est pas une fin, que la vie est un cadeau de la mort, et vice versa, parce que l’une ne peut exister sans l’autre, et que l’éternel retour est contenu dans la pourriture qui nous nourrit…

Voici le titre des chapitres du livre, je vous laisse méditer là-dessus :

  • Espèce de pourri !
  • Un pourri pour tous et tous pour un pourri !
  • Il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark …
  • Jeux de mots pourris
  • Se faire arranger comme du poisson pourri…
  • Touche pas à mon pourri !
  • Tu seras un amateur de pourri, mon fils
  • Rien ne sert de pourrir il faut surir à point
  • Pot pourri
  • Retour vers le pourri
  • Pourriture noble
  • Qui aime bien pourrit bien

Ce livre fait partie de l’excellente collection «Paradoxes», mot qui s’applique parfaitement aux nourritures pourries. cette collection comporte des titres comme : amer, acide, gras, fade… tout un programme, que je vous recommande de découvrir !

Pourri
Les Ateliers d’Argol
16 €, dans toutes les bonnes librairies


Je profite de cet article pour vous apprendre que mon livre « Je mange des aliments fermentés », clic, vient d’être réédité par Hachette, sous le titre « La fermentation en 120 recettes ». Vous y trouverez non seulement des recettes de fermentation, mais des recettes de cuisine à partir d’aliments fermentés.

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32 commentaires sur “Mon dernier livre : Pourri”

  • Bonjour Marie-Claire,
    Je viens de lire votre livre pourri – pardon ! Votre livre « Pourri » 🙂 et je me suis régalé !
    J’ai beaucoup apprécié que vous donniez des recettes à la fin et je me demandais s’il était possible de prolonger sans risque la « maturation » du gravlax… Qu’en pensez-vous ? Jusqu’où peut-on aller ?
    Par ailleurs, vous évoquez la Worcestershire sauce, mais vous ne donnez guère de détails… Pourriez-vous m’en donner une recette ? Ou, au moins, me conseiller une marque qui en propose de l’ « authentique » ? Par exemple, celle de Lea & Perrins est-elle encore LA vraie ?
    Merci d’avance de vos conseils.
    Bien cordialement,
    J-M

    • Oui on peut laisser longtemps le gravlax à condition qu’il soit toujours immergé dans son liquide. Essayez 2 semaines au moins. La limite est celle de votre goût.
      Non je n’ai pas de recette de sauce Worcester, c’est secret, c’est comme le coca cola… 😉
      Lea & Perrins est le créateur de cette sauce, alors que pense que oui, c’est celle qui est la plus authentique. Je ne sais pas s’ils ont cédé aux sirènes actuelles de l’industrialisation qui dévoie tout…

      Voici une recette qui comporte les ingrédients de la sauce, mais à mon avis il faut laisser reposer non pas 1 mois comme il est dit, mais au moins 1 an : CLIC.

  • L’histoire ne s’arrête pas là …
    Dans le même frigo, une bouteille de lait ribot …
    Avait, elle aussi, longuement patienté …
    Et à l’ouverture, elle sentait franchement le fromage ! 😕
    N’étant pas expert en fromages maison et ayant suffisamment à faire avec le boeuf mariné, je refermais simplement la bouteille.
    Et puis, il y a 3 jours, en préparant une sauce Mornay pour accompagner du choux fleur au four, je me rendis compte que je n’avais pas de gruyère …
    C’est alors que je repensais à ce vieux lait ribot … avec lequel je préparais donc la sauce blanche.
    Là aussi, ce fut une réussite !
    Une sauce blanche unique, très légèrement piquante avec un bon goût de fromage …
    Le problème va être de la refaire … 🤔

    Moralité : Je crois que je vais quand même devoir acheter un autre réfrigérateur.
    Mais ce sera pour laisser vieillir certains produits fermentés, avec lesquels je ne peux pas encombrer mon frigo principal !

  • Bonjour Marie-Claire,

    Il y a bien longtemps que je n’ai pas commenté sur votre site.
    J’avais beaucoup aimé votre dernier bouquin : « Pourri » et j’avais laissé un commentaire élogieux mais … je n’avais cependant jamais réellement pensé le mettre en pratique … 😉
    Et puis, par un concours de circonstances, je me suis retrouvé à avoir abandonné des morceaux de boeuf dans une bonne marinade de vin rouge pendant … 10 semaines !
    Au frigo bien sûr !
    Mais 10 semaines au lieu des 2 à 3 jours maximum habituellement recommandés …
    Je me demandais vraiment quelle soupe infecte et moisie j’allais retrouver dans mon réfrigérateur … probablement contaminé à jamais … et que j’envisageais déjà de déposer honteusement dans la plus proche déchetterie …
    C’est donc avec précaution que j’ouvrais la porte de ce frigo condamné, pour découvrir … que tout allait bien !
    Aucune odeur suspecte … pas de moisi en surface de la marinade … dont le niveau avait cependant baissé, laissant émerger légèrement une viande bien noire …
    J’approchais mon nez : un parfum de venaison … mais rien de repoussant.
    Les morceaux de viande restaient manipulables.
    Je tentais donc la recette habituelle : un boeuf braisé aux carottes, avec double réduction du liquide de cuisson (le vin d’abord, puis le reste de vin réduit additionné de fonds de veau) durant 3 à 4 heures de cuisson à doux bouillonnement … avant de reprendre une dernière fois le bouillon réduit pour faire la sauce … la meilleure sauce de boeuf braisé que j’avais jamais faite … et un plat succulent ! 😋
    Morale de l’histoire : je laisse désormais mariner ma viande dans le vin rouge pendant une semaine !

  • Je viens de commander Ni Cru Ni Cuit et Pourri et expérimente deja un certains nombre de recettes a partir de vos livres « aliments fermentes aliments santés » et « boissons fermentées naturelles ». Concernant le titre « aliments fermentes en 120 recettes » apporte t’il beaucoup en plus que ces 2 derniers livres cites? Merci. Cedric

  • Je viens juste de terminer d’engloutir ce dernier livre, je me suis régalée.
    J’avais deja dégusté le premier sur l’histoire de la fermentation.
    Merci pour ces informations, d’une part tres instructives, et d’autre part qui nous decentrent du quotidien aseptisé….

    Je fais partie des personnes incommodées par l’odeur des fromages, ca a fini par passer grâce à un séjour d’un an au-dessus de caves d’affinage de comté, et aujourd’hui je fermente avec plaisir, je mange du fromage avec plaisir, j’adore les charcuteries artisanales, je fais mon pain au levain ainsi que mes yaourts ( au lait cru dès que je peux m’approvisionner) et découvre depuis peu le  » vrai » beurre artisanal, que j’apprécie mieux après avoir lu toutes ces infos sur l’histoire et la culture de l’aliment fermenté. Miam.

    Je pense que ces informations sur le rapport culture/alimentation pourrait être plus médiatisées, connues y compris du  » grand public », pour sortir de cette ère de la javel et des biocides qui nous empoisonnent.. Je vous remercie énormément pour tous vos travaux dans ce sens!

    Et je vous souhaite une bonne reprise dans vote restaurant, que j’espère bien étrenner lors de mon prochain voyage à Paris.

    • Merci beaucoup !
      Malheureusement je crains que ce ne soit pas demain la veille que nous allons sortir de l’ère de la javel et du gel hydro-alcoolique !

  • Bonjour,
    J’attends avec impatience votre livre mais , la conjoncture actuelle retarde sa livraison.
    ( Je lacto-fermente …..OH ! )

  • Bonjour Marie Claire
    Les poires sont encore entières
    Conservées jusqu’au pourrissement
    Et le jus qui a coulé est délicatement
    Piquant …vinaigré
    Puis je mettre les poires entières dans de l’eau et avec une mère j’en ai plein, car vinaigres faits à partir de cidre ou de jus de pommes…?
    Ou bien faire passer les poires molles et brunes par le juycer et récupérer le jus fermenté et faire le vinaigre avec ou sans mère ?
    Merci jai lu mais rien trouvé…
    Geneviève Gwen

    • 🤔 Alors… Oui, le fruits très mûrs s’alcoolisent tous seuls, et puis l’alcool est finalement transformé en vinaigre, c’est la nature. 😋
      Pour faire du vinaigre avec le jus de poires/pommes, on le transforme en poiré/cidre, puis on le laisse devenir vinaigre tout seul, à l’air libre. Non, pas d’eau !
      Je pense donc que la seconde solution est la meilleure.

      • Alors, le dimanche, c’est toujours la 5, en deuxième partie, la charcuterie..!! En voilà de LA fermentation, et je dois quand même préciser que je n’ai pas la télé, et j’ai-urlé, Marie-Claire, venez

  • Bonjour Marie-Claire, j’ai commandé « pourri » directement aux » Ateliers D’Argols  » sa directrice un Ange et la collection paradoxes une vraie mine d’or !!
    Et je suis également adepte du blog de Luna La table de Diogène est ronde/etrangerecuisine, que j’ai découvert grâce à vous. Ça y’est, j’ai le virus !! Après les yourts, lait fermenté, fromages, pains, j’avais fais, pour me lancer, les pieds de porc au choux park choï ( excusez l’orthographe !!) Que j’avais acheté au marché à une petite maraîchère qui fait du bio, je l’ai fais en novembre et l’ai ouvert ce matin : merci pour ce partage, c’est trop délicieux !! J’ai trouvé en ligne ( la maison du Vietnam) du nioc mam de l’île de phu quoc, il s n’ont qu’une marque Long Boat en 250ml ou 500ml 13et quelques€ et 23et quelques euros, c’est cher mais je pense que la qualité le justifie ( ils sont en rupture de stock pour l’instant. ) Je voulais faire du garum,mais je galère pour trouver le contenant préconisé.. PS, je suis dans une association et leur diffuse tous les liens qui parlent de fermentation, mais j’avoue que cela a du mal à passer, quand à ma famille, il n’en peuvent plus !!!!( Mon père me prédit une mort certaine par botulisme !!). Après cette logorée (c’est un euphémisme !!!) je vous souhaites des clients à ne plus savoir où les assoir et d’autres merveilleuses aventures au royaume de la fermentation 🙏

    • Votre père se trompe. Le botulisme, cela concerne les conserves mail stérilisées et la charcuterie mal faite. 😉. Merci à vous.

  • Petite question complémentaire : avez-vous l’intention prochainement de consacrer une chronique complète sur la fermentation des fruits ? Merci.

  • Juste après avoir écouté « On va déguster », j’ai eu envie de commander votre livre immédiatement. Je l’attends avec beaucoup d’impatience. Pourriez-vous me préciser quel type ou variété de fromage sec et de fromage frais vous recommandez pour réaliser la recette de moretum oxyporum. Merci beaucoup pour vos précisions.

    • Merci !

      Le fromage frais : j’ai pris un fromage blanc fermier. Pour le from sec, j’ai pris des petits crottins de chevre très secs. Mais du fromage de vache vieux et bien sec convient aussi.

  • Je viens d’écouter « on va déguster « , sur Inter; je crois que le Moretum sera ma pro haine fermentation !
    Nous nous régalons avec le ketchup, les cèpes, les betteraves….
    Les haricots sont très surprenants par leur acidité 😉
    Les pains et la fouace sont fantastiques !
    Merci pour tous ces partages.

  • Tiens ça me fait penser à mon poulet que j’avais mis à fermenter il y environ deux mois. J’y ai jeté un oeil il y a à peu près un mois et je fus étonné de voir à la surface de la saumure un genre de moisissure duveteuse qui me rappelait celle des fromages comme le mont d’or.
    Je pensais le jeter et au moment de le faire, constatant que la moisissure était régulière, qu’elle s’était stabilisée et était uniquement à la surface, j’ai pris le parti de l’ôter et de la sentir et là : deuxième surprise la moisissure sentait clairement le saucisson. J’en déduis qu’il s’agissait du champignon penicillium, c’est pourquoi je compte bien manger mon poulet qui sent très bon lui aussi.
    Désolé si c’est peut-être un peu hors sujet mais ça m’y a fait penser. En tout cas bravo pour ce nouveau bébé que je vais également m’empresser de lire, ce doit être une mine d’or comme toujours. Merci Marie-Claire et bonne soirée !

  • Bonjour Marie-Claire,

    J’ai lu ce livre que j’ai beaucoup apprécié.
    Je remets ici le commentaire que j’avais fait il y a quelques semaines dans « Des suris et des hommes »

    Un grand merci pour cette nouvelle synthèse magistrale de ce que vous avez exploré, découvert et compris en étudiant le fermenté dans l’alimentation humaine, depuis les premiers hommes jusqu’à nos jours.
    Un livre court, plein de finesse et d’érudition, très documenté, technique quand il faut, parfois presqu’un peu philosophique et surtout, engagé.
    Un livre qui va à la racine des mots, des choses et de la vie.
    Des mots et des idées justes qui nous remettent la cervelle à l’endroit, dans notre monde soumis aux multinationales et à leur communication perturbante.

    Bonne journée et bon courage dans cette période difficile pour votre restaurant.
    Mais vous avez tellement de cordes à votre arc que, d’une manière ou d’une autre, vous passerez ce cap difficile.

    • Merci beaucoup ! Pour le cap difficile, ce n’est pas encore gagné, mais on se battra. Des messages comme le vôtre font chaud au coeur.

  • Sur la page de couverture de ton livre, il y a un fromage…ressemble a celui que je fais a partir de deux yaourts chèvre nature entier…ça prend en gros 1 mois ou plus…ça dépend mais cest bon et ça revient pas cher(salage, pointe d d’espelette et egouttage). Je l aime quand il est vuvet noir…je le garnis de sarriette pour finir l affinage…crémeux.. Bravo pour ce livre qui correspond tout à fait à ma façon de voir les choses.

  • Bravo pour ces 2 livres, j’avais finalement réussi à me procurer l’ancien « je mange des aliments fermentés »
    Cette fois ci je ne vais pas tarder à me procurer votre nouveau livre, avant qu’il ne soit épuisé!
    Bonne continuation, je continue à venir ici chercher des recettes et des trucs régulièrement

  • J’ai presque tous tes livres, il faut que je rajoute celui-ci = Pourri … ha ha ha, ça c’est bien toi !
    J’ai hâte de le lire et relire, cela va être un sacré plaisir et découverte…
    Merci Marie-Claire de nous régaler à tous les niveaux. Quel plaisir de lecture et gustatif

  • Bravo pour explorer aujourd’hui et réhabiliter cette part si importante de notre alimentation et de notre culture alimentaire. Tantôt délaissée et rejetée, tantôt oubliée.

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