Un peu de douceur ne fait pas de mal ! Quand on a égoutté les fruits du kôsô ou du Cheong (cliquez ici pour voir ce que c’est), on s’intéresse beaucoup au sirop que l’on met en bouteille, mais on ne sait pas toujours quoi faire avec les fruits (qui, il faut le dire, on perdu un peu de goût). Voici une idée pour les utiliser d’une manière assez gourmande: un bundt cake, ce gros gâteau américain qui en réalité est allemand, rendons à César…
C’est quoi un bundt cake ?
Venu des USA, ce gâteau fait fureur sur les réseaux sociaux culinaires depuis quelques années. Ce n’est pas un gâteau avec une recette particulière: il porte simplement le nom de son moule, fabriqué depuis les années cinquante du vingtième siècle dans une usine de Minneapolis. Enfin c’est ce que le service de presse de cette usine nous raconte.
Cette ville était alors riche d’une importante communauté d’immigrants d’Europe de l’Est. En 1950, dit le service de presse, des femmes appartenant à une association religieuse juive ont demandé à ce fabriquant de leur fournir un moule traditionnel, dont elles possédaient de vieux exemplaires en terre cuite fêlée, afin de cuire les gâteaux pour leurs réunions.
Devinez la forme du moule…
Ce n’était pas autre chose que le moule à kouglof, haut, cannelé et avec une douille centrale. Le mot Bund en allemand signifie réunion, association et le Bundkuchen est donc un gros gâteau qui comporte beaucoup de parts, autrement dit un gâteau pour les grandes tablées. C’est ainsi que le fabriquant de Minneapolis nomma son moule en lui ajoutant un t pour le personnaliser, disent-ils toujours, et déposa le nom.
Hum hum. Cette histoire vous convainc ? Pas moi. Sachant que l’orthographe Bundtekuchen est signalée dans un livre de cuisine allemand du début du XX° siècle, on peut en douter. Une petite recherche, et on trouve que le terme Bundtkuchen figure tel quel dans un livre américain de 1903 intitulé « The settlement cookbook« , dont la première édition datait de 1900.
Voici une des recettes du livre… on constate que c’est tout simplement une recette de kouglof : levure de boulanger, beurre, oeufs, lait, farine. Manque juste les raisins secs.

Ce livre a été édité à Milwaukee dans le Wisconsin (tiens tiens, même région que le fameux fabricant de moules) par le mouvement des « settlement houses« , qui étaient des maisons d’aide sociale en direction des nouveaux immigrants, qui comme je l’ai déjà dit, dans cette région du Wisconsin étaient principalement des familles juives arrivant d’Europe. Ce livre contenait des recettes de cuisines juive dont énormément de spécialités sont en fait des plats traditionnels de leurs régions d’origine en Europe, et des recettes américanisées. Le livre contenait aussi des informations nutritionnelles, et tout un tas de conseils ménagers utiles aux maîtresses de maison nouvelles arrivantes. Le tout dans un but d’assimilation à la culture américaine. Le livre a été régulièrement réédité jusque dans les années 50.
Ici le lien pour en consulter quelques pages sur Google books . Il y a aussi la recette des Schnecken qui ne sont pas autre chose que les roulés à la cannelle, des beignets berlinois et des petits croissants (kipferl) aux noix.
Le nom de bundt cake n’a dont pas du tout été inventé en 1950 par le fabricant de moules de Minneapolis. C’est tout simplement une usurpation à but publicitaire ! Voilà, la vérité est rétablie. (Il n’en reste pas moins vrai que leurs moules sont très beaux et de très bonne qualité, et que c’est une petite folie).
Le bundt cake est donc tout simplement un gâteau cuit dans un moule à kouglof. Le nom du moule est américain, mais ce sont bien des gâteaux germaniques qu’on fait cuire dedans. On trouve donc toutes sortes de recettes de bundt cakes, vous pouvez faire cuire votre gâteau préféré dans un moule à kouglof et il deviendra ainsi un bundt cake, mais ce n’est pas pour autant qu’il sera naturalisé américain.
Mais revenons à mon gâteau au chocolat
Je l’ai fourré avec des bleuets (s’il vous plaît, je vous en conjure, arrêtez d’appeler ces grosses baies noires des myrtilles, car ça n’a rien à voir avec des myrtilles), qui ont fermenté depuis 2021 dans le sucre. Je les ai égouttés il y a quelques mois et ils se sont d’ailleurs encore très bien conservés dans un bocal sans leur sirop. J’ai utilisé une recette de cake au chocolat que j’ai depuis des lustres, en l’adaptant : diminué le sucre, augmenté le beurre, oui, oui, et recalculé les proportions pour qu’il remplisse ce très beau moule américain.
Vous pouvez faire ce gâteau avec n’importe quels fruits. Et si vous n’avez pas de kôso ni de cheong… faites-le avec des fruits frais, ça fonctionne très bien aussi, sauf que le goût sera évidemment différent.
Pour le gâteau
- 500 g de fruits fermentés en Kôsô ou en cheong*
- 400 g de farine
- 11 g de poudre à lever (soit 1 sachet)
- 80 g de cacao en poudre
- 360 g de beurre très mou
- 200 g de sucre (vous pouvez en mettre moins si vos fruits sont très sucrés)
- 5 œufs
- 100 g de chocolat noir haché ou bien des pépites
- Facultatif : 50 g de kirsch ou autre eau-de-vie, j’ai mis de la quetsche. Vous pouvez aussi mettre su sirop des fruits mais alors diminuez le sucre dans la recette.
* Ou en fruit de 100 jours, ou en confiture de vieux garçons pour celles et ceux qui ont mes livres
Pour le glaçage (qui est facultatif) :
- 4 cuil. à soupe de sucre glace
- 2 cuil. à soupe de sirop des fruits fermentés
- 1 trait de jus de citron
- 50 g de beurre fondu
- 40 g de fromage blanc
- Egouttez-bien les fruits dans une passoire. Préchauffez le four à 180°C. Beurrez et farinez un moule à kouglof, à cake ou à bundt cake (contenance un litre et demi).
- Mêlez la farine, la poudre à lever et le cacao dans un grand bol, ajoutez les fruits égouttés, mélangez bien.
- Dans un autre grand bol travaillez le beurre en pommade avec le sucre. Ajoutez les oeufs 1 par 1 en mélangeant bien. Ajoutez enfin le mélange de farine, puis le chocolat haché et enfin l’eau de vie.
- Remplissez le moule avec la pâte et enfournez. Laissez cuire 30 minutes à 180°C puis 30 minutes à 170°C et encore 30 à 40 minutes à 150°C. Une brochette plantée dans le gâteau doit ressortir sèche, sinon prolongez la cuisson.
- Démoulez sur une grille 10 min après la sortie du four et laissez refroidir. Mélangez les ingrédients du glaçage pour obtenir une pâte un peu coulante et passez-le au pinceau sur le gâteau refroidi.
Ce gâteau est encore meilleur si on l’enveloppe dans une feuille d’aluminium ou autre dispositif d’emballage qui ferme, et si on attend le lendemain pour le déguster (je sais, c’est pas facile, mais ça vaut le coup). Il sera plus moelleux et les parfums vont se développer.
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